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Projet de loi « Sapin 2 » et Reporting fiscal : pourquoi les entreprises crient au loup ?

Alors que le Ministre SAPIN proclame sa volonté de lutter contre la fraude et l’évasion fiscale (et tout dernièrement lors du Conseil des Ministres du 1er juin) et se félicite des « progrès accomplis en la matière »… se joue actuellement à l’Assemblée Nationale un débat des plus révélateurs sur des mesures concrètes que pourrait prendre le Gouvernement pour mettre réellement à exécution ses déclarations d’intention.

En effet le projet de loi « Sapin 2 » sur la transparence fiscale de la vie économique aborde des questions politiques cruciales telles que la lutte contre la corruption, la protection des lanceurs d’alerte et la publication des données fiscales des entreprises. Ce dernier point, appelé Reporting fiscal, est au cœur des débats, il avait déjà été littéralement torpillé par le gouvernement lors des débats parlementaires en fin d’année 2015 (voir le communiqué CGT de décembre 2015, également téléchargeable à droite de la fenêtre.)

REPORTING FISCAL : QU’EST-CE QUE C’EST ?

Photographie et publication par les entreprises des activités impôts et effectifs dans tous les territoires où elles sont implantées permettant de repérer d’éventuels transferts de bénéfices et de savoir si elles paient bien leur juste part d’impôts dans les territoires où elles créent de la richesse.
Outre le principe de publication des données, ce sont le périmètre géographique des activités concernées (mondial, européen ou territoire français) et la nature des données publiées qui donneront à cette obligation de publication (« reporting ») le degré de transparence nécessaire.
L’amendement voté en commission prévoit d’obliger les entreprises de plus de 750 millions d’euros de chiffre d’affaires à rendre publiques les données suivantes pour chaque pays d’implantation : nature des activités, chiffre d’affaires, effectifs, bénéfice, impôt dû, impôt acquitté, bénéfices non distribués. Le seuil sera abaissé à 500 millions d’euros dans deux ans, puis à 250 millions dans quatre ans. Cette disposition devrait entrer en vigueur en même temps que la directive européenne ou, au plus tard, en juillet 2017. Elle s’appliquerait aux filiales au sein de l’UE et aux paradis fiscaux tels que définis par la Commission européenne.

L’information publique et la transparence sont un rempart efficace contre l’évitement fiscal et un outil de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale. C’est pourquoi, le reporting pays par pays est réclamé par la CGT, ainsi que par les par les ONG (CCFD-Terre solidaire, ONE, Oxfam France et Peuples solidaires-Action Aid France…). Et c’est pourquoi il fait si peur au monde « secret » des affaires. Ainsi, le MEDEF et l’Afep (Association française des entreprises privées) y voient une atteinte à la compétitivité des entreprises (rendre publiques certaines données rendraient stratégiquement les entreprises plus fragiles dans un contexte de concurrence mondiale effrénée) et une source de renoncement pour les administrations fiscales à l’échange automatique des informations (puisque les données seraient publiques, plus besoin de les transmettre). Pourtant, les banques qui y sont soumises depuis 2013 n’ont pas vu leur « compétitivité » mise à mal.

Les scandales d’évasion fiscale qui se succèdent, et le dernier épisode des « Panama papers » singulièrement, révèlent que l’opacité des activités des multinationales doit être combattue avec d’avantage d’ambition. Si l’évasion fiscale coûte chaque année à la France, entre 40 et 60 milliards d’euros, les pays en développement en sont les premières victimes et perdent chaque année 180 milliards de dollars de recettes fiscales : il est temps de mettre fin à cette hémorragie financière.

Les discussions parlementaires sont en cours et une directive européenne est aussi en cours d’élaboration. D’un côté l’intérêt général du plus grand nombre des citoyens et des contribuables et une vraie mesure de lutte contre la fraude et l’évasion fiscale, de l’autre les intérêts financiers et économiques des milieux d’affaires plus intéressés par une optimisation fiscale maximale que par un réel civisme fiscal. Aujourd’hui c’est aux politiques de trancher. La politique d’austérité et d’attaques contre les droits des salariés que poursuit le gouvernement appelle des changements profonds dans ces choix de société qui doivent être en phase avec les attentes et les revendications portées par les salariés dans les luttes en cours. Les décisions des politiques orienteront dans un sens ou dans un autre la prise en compte à un niveau européen voire mondial de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale. La transparence engendrée par la publication obligatoire du reporting « pays par pays », que la France serait un des premiers pays à adopter, serait un gage concret évident de cette prise en compte.

La CGT Finances Publiques et la Fédération des finances revendiquent de véritables moyens humains juridiques et matériels pour lutter efficacement et réellement contre la fraude et l’évasion fiscale mondiale. Dans cette perspective, le projet de loi « Sapin 2 » doit porter au plus haut niveau l’exigence de lutte contre la corruption, la protection des lanceurs d’alerte et la publication du reporting pays par pays, sans omettre les paradis fiscaux, et sans se limiter aux grandes firmes multinationales aux énormes chiffres d’affaires.

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Article publié le 8 juin 2016.


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