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Histoire de la CGT Finances publiques

Avant 2008 et la fusion Impôts/Trésor, dans l’ex-DGI la CGT Finances publiques se dénommait le SNADGI-CGT. Voici son histoire, à travers un extrait du rapport introductif au XVIème congrès du SNADGI-CGT à Seignosse du 11 au 14 mars 2003.

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Le 19 avril 1903, à 14 heures, salle des fêtes de la Mairie du 9ème arrondissement, trois cents agents des contributions indirectes, pour l’essentiel en poste dans les départements de la Seine et de la Seine-et-Oise se réunissent sur convocation d’un Comité d’initiative. Un seul point figure à l’ordre du jour de la réunion : la création d’une association des agents des contributions indirectes. Au terme de la rencontre, un Conseil d’administration et une Commission de contrôle sont élus ; l’Union générale des contributions indirectes est née. L’Assemblée générale se sépare aux cris de : « Vive l’Union générale ! ».

Il y a donc 100 ans le coup d’envoi venait d’être donné à une aventure qui dure encore.

C’est l’œuvre de pionniers courageux, parmi lesquels Henri Mirel et Edouard Delmas occupent la première place. La jeune association qui n’est pas encore un syndicat (la loi n’autorise pas les syndicats de fonctionnaires) va connaître un développement rapide jusqu’à regrouper l’immense majorité des agents des indirectes. C’est un groupement combatif, selon les normes du temps, qui va travailler avec obstination à l’œuvre de défense des intérêts individuels et collectifs. Mettre fin aux arbitraires, gagner la place d’interlocuteur reconnu de l’administration, la tâche est immense.

La création de l’UGCI est une composante importante du mouvement de création d’organismes de défense au sein des administrations. Très vite la question du regroupement en Fédération des organisations existantes se pose dans une période ou l’Etat bataille dur pour contrer le mouvement. Il faudra attendre l’après première guerre mondiale pour que ce besoin se concrétise.

La régie des indirectes est considérée comme la « régie mineure », le royaume des rats-de-cave. Les traitements sont bas, les carrières atones, les conditions de travail éprouvantes. Il faudra trois décennies de travail acharné pour parvenir à des corrections.

Au lendemain du premier conflit mondial, le vent de l’histoire paraît tourner dans le bon sens. Malgré la loi toujours hostile, les associations se transforment en syndicats. L’UGCI est du nombre et devient Syndicat national des agents des indirectes. Rude bataille. Menace de dissolution, interdiction de la CGT, osée (geste dérisoire) par un Tribunal correctionnel.

A la tête du mouvement Michel Piquemal, remarquable d’allant et d’idées, œuvre à briser les vieux cadres d’intervention, plaide pour un syndicalisme de combat. Cela lui vaudra la révocation. Une bataille syndicale obstinée de trois années sera nécessaire pour la faire annuler.

Le SNACI s’affirme à la gauche du syndicalisme des fonctionnaires. Il a adhéré à la CGT mais la scission CGT/CGTU de 1922 le pousse vers une autonomie combative. Proche dans les faits de la CGTU, il milite pour une réunification sur des bases de combat, anime avec le syndicat des douanes actives une Fédération autonome des Fonctionnaires, combat ceux qui sous la direction de Charles Laurent ont décidé de rejoindre la CGT réformiste de Léon Jouhaux.

Le syndicat mène une bataille incessante pour ce qu’il appelle « le relèvement de la corporation » et obtient en 1929 des résultats importants. Parallèlement il développe un formidable effort mutualiste, crée une Caisse de secours efficace, acquiert par souscription le domaine de Granès, d’abord destiné aux soins des tuberculeux puis transformé en lieu de séjour pour tous. L’épopée de Granès est immense. Granès est placé en autogestion. Une grande bibliothèque y est installée. C’est la preuve de la capacité réalisatrice de la corporation. C’est aussi le symbole d’un engagement militant : des enfants espagnols y séjourneront en 1939 et des convois en direction de l’Espagne républicaine y feront halte.

En 1935, le SNACI a rejoint la CGT dans le contexte de la réunification générale qui se produira en 1936 lors du congrès de Toulouse. Michel Piquemal a passé le relais à Robert Laplagne. Pierre Boursicot et Jean Mons (au futur destin politique controversé) assureront le secrétariat général jusqu’à la deuxième guerre mondiale. En 1940 c’est la dissolution. La Caisse de secours poursuit quelques activités et sert de couverture à une direction syndicale embryonnaire.

A la Libération le syndicat se reconstitue et retrouve son audience et son prestige. Il gardera jusqu’en 1968, date de sa dissolution dans le SNADGI, une représentativité très forte au sein de la régie des Indirectes.

Durant vingt années il va mener un combat obstiné pour obtenir l’harmonisation de la situation des personnels des indirectes avec celle des agents des autres régies financières (directes et enregistrement). Il y parviendra en 1968, sous l’impulsion de Jacques Roché, et ce succès ouvrira la voie à la création dans les faits de la DGI annoncée dès avril 1948 dans les textes.

Je ne puis entrer dans les innombrables péripéties de ces deux décennies, mais je voudrais souligner quelques éléments : le SNACI affirme par dessus tout son souci d’unité interne : dans l’entre-deux guerre il a combattu et mis en échec une scission et au moment de la scission FO en 1947, il choisit l’autonomie pour une année et revient ensuite à la CGT. Il fonde son unité sur la base d’une très libre expression des opinions comme en témoigne l’existence d’organes d’expression indépendants (« Le réveil des Indirectes » puis le « Nouveau Réveil »).

Au sein de la CGT, le SNACI occupe une place particulière, affirmant parfois l’originalité de ses positions avec force. Il en est ainsi à propos de la question un moment posée de la nécessité pour la CGT d’avoir un programme économique. Le SNACI y est favorable.·La grande secousse des événements de Hongrie met en péril l’unité du syndicat, mais le SNACI surmonte la crise.

La question algérienne suscite de graves divergences avec la section d’Algérie qui quitte la CGT mais maintient cependant des liens avec le Syndicat national. Cette situation conduira plus tard le retour au SNACI des anciens adhérents d’Algérie qui ont bénéficié d’une aide considérable du Syndicat après leur retour en métropole. Le SNACI porte après la scission FO la pérennisation du syndicalisme CGT aux Finances et dans les principaux secteurs de la fonction publique de l’Etat. Il fournit pendant trois décennies à ces deux structures ses principaux dirigeants. Permettez-moi d’évoquer leur nom dans l’ordre d’apparition aux responsabilités : Jacques Pruja collaborateur du premier statut général ; André Clerc ; Léon Clair ; Léon Rouzaud qui à l’heure de la répression en 1952 sera appelé auprès du Bureau confédéral ; Pierre Della plus tard dirigeant de la Caisse de secours ; André Berteloot qui intégrera le Bureau confédéral pour vingt années ; Roger Loubet qui plus tard assurera la direction de la Verrerie ouvrière d’Albi créée par Jean Jaurès ; Alban Briand ; René Bidouze qui deviendra directeur de cabinet d’Anicet Le Pors, artisan à ce titre du deuxième statut général et plus tard conseiller d’Etat ; Michel Bonicel.

J’ajouterai que le SNADGI-CGT apportera à son tour une contribution militante aux responsabilités confédérales. René Buhlh, Jacqueline Dervilly, Ernest Deiss seront membres du Bureau confédéral et, continuant cette tradition, Jean-Christophe Le Duigou occupe aujourd’hui les responsabilités que chacun connaît.

En décembre 1968, le SNACI se dissout, comme se dissolvent les syndicats CGT des contributions directes et de l’enregistrement, plus modestes en effectifs et en influence mais qui sont tout de même des réalités bien vivantes. Le Syndicat national unifié du cadastre se dissout également. C’est un syndicat de tradition autonome mais un très vieux compagnonnage dans l’action et le travail en commun avec le SNACI a tissé des liens qui propulsent le SNUC vers la construction unitaire en gestation.

La voie est ouverte pour la création du SNADGI-CGT. Elle se concrétisera en 1970, lors du congrès de Saint-Nazaire. Une nouvelle époque s’ouvre, différente des précédentes : il s’agit de construire un syndicalisme CGT à l’échelle de la DGI alors même que subsistent les cultures de Régies avec leurs sanctuaires syndicaux.

On le sait sans doute, le rêve d’un syndicalisme unique fut un moment caressé. L’existence de listes communes avec le SNUI aux élections aux CAP jusqu’en 1970 en témoigne. Ce rêve a été l’enfant de l’expérience de l’efficacité d’un syndicalisme unifié.

L’histoire a soldé cette question et c’est donc une DGI marquée par un grand pluralisme syndical qui émerge de la décennie 1960. Que dire des trente années écoulées depuis lors ? Est-il encore trop tôt pour porter une appréciation pertinente ? Sans doute, mais on peut évoquer quelques pistes de lecture. Nous disposons pour ce faire de quelques données qui parlent fort.

Après une période de croissance la syndicalisation à la CGT s’affaiblit. Le progrès qui suit la création du SNADGI s’enracine dans une période de forte croissance des effectifs administratifs et dans un contexte politique porteur, celui de l’union de la gauche. La période de recul naît sous l’effet de plusieurs facteurs : la désunion politique à gauche qui met à mal l’unité interne dans le contexte d’affrontements idéologiques particulièrement vifs ; la difficulté à faire évoluer un modèle syndical très centralisé ; le recul général de la syndicalisation dans le pays.

La perte d’influence a suivi, bien que moins brutalement, celle de la syndicalisation. On peut dire qu’à la moitié de la décennie 1980, le SNADGI-CGT a frôlé des rives dangereuses pour son existence même.

Dans ces difficultés, le SNADGI-CGT est resté combatif et montrera toutes les qualités qui sont les siennes lors de la grande grève de 1989, propulsant une nouvelle culture de lutte et démocratique (la souveraineté des Assemblées générale). L’impulsion donnée au cours de le la grève de 1995 est à mettre au compte de ces qualités. De même que l’intense travail de lutte et de propositions réalisé au cours de l’hiver 2000.

Dans toute cette période, il s’est attaché à développer des efforts de transformation de ses fonctionnements mais les résultats sont contrastés. Rappelons-nous ces débats encore vifs aujourd’hui qui touchent à l’activité spécifique et à la place du syndiqué, à l’organisation sur les sites. Je ne reviendrai pas, sauf pour la noter, sur la grave crise syndicale traversée il y a maintenant dix ans et qui est maintenant derrière nous.

Le SNADGI-CGT a stabilisé ses effectifs depuis cette période, il a depuis six ans progressé en influence, mais n’est pas installé dans un avenir assuré. Il dispose d’une histoire d’une exceptionnelle richesse. C’est un atout de taille. Il a l’expérience de la conduite de mouvements prolongés. Il maîtrise bien les questions de l’unité. Il dispose d’un réseau militant de qualité et de femmes et d’hommes de conviction. Ce patrimoine est la chance offerte à notre avenir.

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Article publié le 23 mai 2016.


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