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Nouveau code de la Fonction publique : Le gouvernement refait la carrosserie pour pouvoir changer le moteur !

L’ordonnance portant partie législative du nouveau code général de la Fonction publique a été signée le 24 novembre 2021 et publiée le 5 décembre 2021 pour entrer en vigueur le 1er mars 2022. La partie réglementaire du nouveau code interviendra en 2023.

QUELQUES RAPPELS HISTORIQUES :

Au 20ème siècle, la France s’est dotée d’une administration qui, aujourd’hui encore, constitue un modèle de référence pour de nombreux pays. Le statut des fonctionnaires, voté à l’unanimité des députés, fixe par la loi les droits et obligations de tous les agents publics. Il constitue des éléments indissociables du rôle et de la conception de L’État, et la pierre angulaire de cette organisation administrative. Il a connu de nouvelles avancées avec la loi du 13 juillet 1983, en intégrant dans son champ la Fonction publique Territoriale et la Fonction publique Hospitalière.

Ce statut est une des grandes conquêtes démocratiques de la Libération. Largement inspiré du programme élaboré par le Conseil National de la Résistance, les mesures mises en œuvre par les gouvernements de l’époque visaient notamment à instaurer un type nouveau de démocratie économique et sociale impliquant l’éviction des grandes féodalités économiques et financières, par un programme de nationalisation des secteurs clés de l’économie et un renforcement de l’intervention de L’État au-delà des simples champs régaliens. Il s’inscrit dans une logique de refondation dans laquelle les services publics étaient alors considérés comme les poumons de la modernisation sociale, du développement économique et du rapport démocratique à la république.

Articulé autour de grands principes, tel l’unicité et l’adaptabilité de la Fonction publique, le droit à la carrière, la distinction entre le grade et l’emploi, la responsabilité individuelle et collective, le statut devait apporter à toute la population certaines garanties fondamentales, en les donnant aux agents publics. C’est d’autant plus primordial que les missions de la Fonction publique portent sur des besoins et des droits essentiels pour les citoyens.

OBJECTIF DU STATUT :

  • Assurer l’indépendance et la neutralité du fonctionnaire ;
  • Respect du principe d’égalité de traitement en libérant le fonctionnaire de toutes pressions d’ordres politiques ou pouvant être exercées par des lobbies ;
  • Faire du fonctionnaire un citoyen responsable et non un rouage du système.

De fait, l’histoire du statut lui aura aussi permis de reconnaître le droit syndical, de permettre aux fonctionnaires de participer à la gestion de leur carrière par l’intermédiaire des représentants des personnels. Il permettra aussi de clarifier et d’améliorer le système de rémunération et surtout ce sera l’affirmation de garanties fortes assurant une carrière sécurisée pour les fonctionnaires d’État.

AVANT L’ORDONNANCE DU 24 NOVEMBRE 2021 :

Le statut général des fonctionnaires est issu de 4 lois formant chacune l’un des titres de ce statut :

Le code de la Fonction publique reprenait cette configuration législative (distinguant les trois versants de la Fonction publique, d’État, Hospitalière et Territoriale), enrichie des nouvelles lois, de textes réglementaires ainsi que des dispositions re-codifiées, d’articles expressément abrogés et surtout des jurisprudences. Ainsi conçu, ce code portait statut des fonctionnaires :

  • Première partie : Droits et obligations des fonctionnaires,
  • Deuxième partie : Fonction publique de l’État,
  • Troisième partie : Fonction publique Territoriale,
  • Quatrième partie : Fonction publique Hospitalière,
  • Appendice : pensions et retraites.

APRÈS L’ORDONNANCE DU 24 NOVEMBRE 2021 :

L’ordonnance codifie autrement les lois statutaires de la Fonction publique et codifie des textes de lois plus récents.
Mais elle ne reprend plus la codification calquée sur les 3 titres du statut issus des lois de 1984 à 1986.
Elle regroupe, « à droit constant », les dispositions législatives applicables aux agents publics, titulaires comme contractuels.
Elle reprend, dans le cadre d’un plan thématique, le droit applicable aux trois versants de la Fonction publique, fusionnant les dispositions lorsqu’elles sont identiques, fonctionnaires comme contractuels, en maintenant les spécificités de chacun des versants lorsqu’elles existent.

Huit livres composent maintenant la partie législative du code général de la Fonction publique :

  • Le livre Ier : droits, obligations et protections.
  • Le livre II : exercice du droit syndical et dialogue social.
  • Le livre III : recrutement, avec un titre propre aux emplois de direction des trois versants.
  • Le livre IV : principes d’organisation et de gestion des ressources humaines. Un titre est aussi consacré au télétravail, un autre aux réorganisations de service.
  • Le livre V : carrière et parcours professionnels avec conditions d’appréciation de la valeur professionnelle des agents.
  • Le livre VI : temps de travail et congés.
  • Le livre VII : rémunération, « avantages », frais et action sociale.
  • Le livre VIII : prévention et protection en matière de santé et de sécurité au travail.

POUR QUELLES CONSÉQUENCES ?

Celle nouvelle codification n’est pas neutre. Elle ne respecte plus l’architecture du statut général. Elle rassemble les éléments des 4 lois dans des livres thématiques et fusionne dès que possible des dispositions. Mais ces thématiques relèvent davantage de la boîte à outils GRH que de la construction juridique respectant la solidité des garanties du statut.

En cherchant à s’inscrire plus du point de vue du membre du personnel qu’à partir de la logique du fonctionnaire, la nouvelle codification poursuit une politique visant à banaliser davantage le recours aux agents contractuels et la portée du statut général des fonctionnaires. Elle s’inscrit dans une logique de relativisation des principes statutaires au prétexte de simplification.

LA RÉÉCRITURE « À DROIT CONSTANT » EST UN FAUX AMI :

Différente de la codification « de plein exercice », la codification « à droit constant » compile des textes existants. Elle opère une sélection dans le droit existant sans reprendre l’ensemble des textes en vigueur, avec une incapacité à intégrer la jurisprudence in extenso. La réécriture « à droit constant » implique alors une interprétation codifiée, notamment des jurisprudences qui ne seront plus appréciées par un juge administratif garant de neutralité mais par un service RH, donc directement par l’employeur.

Ainsi, nous comprenons plus aisément le passage scandaleux par ordonnance de cette nouvelle codification.
Le gouvernement cherche tout simplement à s’affranchir des lois de 1983 à 1986 dont est issu le statut général des fonctionnaires, après s’être déjà attaqué au code du travail par ordonnances en 2017.
Le gouvernement veut marginaliser et affaiblir la portée du statut.
Il poursuit sa politique d’attaques contre la Fonction publique (loi transformation de la Fonction publique, loi 3DS dans les territoires, poursuite des suppressions massives de postes, développement du recrutement des contractuels, etc).

Pour la CGT Finances publique, le code de la Fonction publique doit porter et consolider le statut général des fonctionnaires et non chercher à l’affaiblir ou le détricoter. Il faut recruter massivement des fonctionnaires par voie de concours directionnel national et les personnels contractuels doivent être titularisés.

Notre statut, garant entre autre de notre neutralité, constitue une protection pour les agents comme pour la population, contre l’arbitraire et les intérêts privés, pour l’intérêt général. L’ordonnance du 24 novembre 2021 doit être abandonnée !

Article publié le 25 février 2022.


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